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AMONTANHADA je l’ai cueilli dans mon jardin…. Les spectateurs sont passés par le portail entrouvert sur le côté. Ils ont trouvé des chaises dépareillées, se sont assis, ont regardé. Certains sont montés de l’escabeau au toit de l’abri fraichement construit. Propre et fragile peut-être. Les artistes auraient aimé pour scène un espace de terre à l’ombre, où l’herbe n’a pas encore poussé. Je ne préfèrerais pas, je leur ai dit… Ils observent, regardent. L’artiste blague, dit qu’il vient pour la visite de la maison à vendre… Ils sont entrés par le portail, ça n’en finissait pas d’arriver, se sont assis sur des chaises en plastique, puis des chaises en bois réquisitionnées, dedans. Certains sont encore montés sur le toit, d’autres sur des fauteuils de mon « salon », les artistes ont pris scène sous l’arbre totem, ils ont posé la grosse enceinte dans l’arbre totem où pendent des objets, des dentelles, une clé, la vieille poêle d’Albert, une théière, qui pourrait se briser. Joan Francés Tisnèr a posé un instrument bizarre, à coulisse, dans le pot où un chêne, petit chêne, commence à grandir. Les gens ont regardé et je regardais les gens regarder. Dans mon jardin, sur le grillage derrière, les pinces à linge pour mettre au vent mon intime. A l’arbre, tous ces objets pendus pour mon plaisir privé, plus ou moins chargés d’histoires. Dans un angle, le poirier d’Albert, aux poires à peine mûres mais prêtes à tomber, certaines au sol peut-être déjà. Plus assez de chaises pour les retardataires, deux s’assoient sur la même, une chaise de bois fatiguée. J’ai ouvert le portail de mon jardin et j’ai peur un peu, pour mon jardin, pour les chaises, pour les poires, pour mes objets, pour la lecture qui peut en être faite, pour les gens. Je me sens envahie, un peu. Je me sens responsable beaucoup. Pas de danger réel, mais j’ai peur, quand même, un peu. Mais maintenant, ils sont tous là, alors je regarde. Des grands plus ou moins, des petits plus ou moins, des jeunes plus ou moins, un par chaise, plus ou moins, des gens d’ici que je connais, des inconnus d’ici et d’ailleurs, deux chiens, ils regardent, ils écoutent les témoignages de bergers, entre Pyrénées et plaines de Gascogne, restitués par Isabelle Loubère, et Joan Francés Tisnèr, en français, en patois, en chant, en son et en parler. Ils sont bien plus de 80 dans le jardin. Certains sont passés par le petit portail à peine ressoudé, d’autres, les bergers, sont venus par la voix du musicien et de la comédienne. Lorsque Isabelle et Joan ont cité tous les noms des bergers, j’ai reconnu celui de François Bayes, avec qui je partageais la veille une bolée de cidre, dans ma cuisine. Tous ont trouvé place, tous regardent, écoutent Amontanhada, voyagent, la montagne derrière est un tremplin pour voyager plus loin. Il est beau il est grand le petit jardin au portail ouvert. Je ne le croyais pas capable d’accueillir aussi grand, aussi beau. Joan fait sienne la théière qu’il percute en chantant. Des gens encore s’installent sur les trois marches arrondies qui séparent le dedans et le dehors. J’ai fermé le dedans, et j’ai ouvert en grand le jardin et je ne regrette rien. Ils sont partis, comme ils sont venus, presque. Du toit, ils sont descendus en marche arrière. De l’herbe et des chaises, se sont levés, silencieux et bavards et souriant, émus. Un berger voisin m’a raconté un temps d’estive qui n’existe plus, où ils restaient là-haut et se partageaient le repas entre bergers, une fois la traite finie. Le jardin s’est vidé de sa sérénité peuplée. Ce matin, il est autre, sous la pluie. Un oiseau, des oiseaux piaillent et la théière pendue à l’arbre totem, sans même la percuter, rejoue l’enchanteur spectacle de la veille. Merci d’être passé dans mon jardin… (Amontanhada a été créé dans le cadre de l’exposition de Marquèze par une artiste du territoire du parc Naturel Régional, Isabelle Loubère et un artiste Pyrénéen, Joan Francés Tisnèr.) » Manoell en son jardin, mercés a Marion e Alain tanben 😉 https://www.facebook.com/Dounbienesounbas/photos/a.733994429952793.1073741829.729097460442490/829686317050270/?type=1
Hadiu 